Depuis la fin des années 90 et l’émergence des moteurs de recherche, notre utilisation d’internet a été considérablement bouleversée. En effet, ces nouvelles technologies introduites dans notre société de consommation ont entrainé l’émergence d’algorithmes pointus permettant la collecte de nos données personnelles à des fins commerciales. Dans ce contexte, aujourd’hui l’utilisation de ces algorithmes de référencement tend à faire débat.
Ces algorithmes de référencement aussi appelés SEO sont ensemble des traitements mathématiques appliqués aux pages web et contenus présents dans l’index du moteur pour déterminer leur classement et leur présentation dans les pages de résultats. Concernant les données personnelles, elles représentent toute information se rapportant à une personne physique identifiée ou identifiable. Mais, parce qu’elles concernent des personnes, celles-ci doivent en conserver la maîtrise (CNIL). En prenant compte ces éléments, la question que nous nous posons aujourd’hui repose autour de l’influence de ces algorithmes dans notre vie quotidienne.
A partir d’un sondage réalisé sur 171 personnes, nous allons construire le profil d’une personne et son utilisation quotidienne d’internet. Tout au long de cet article nous suivrons Emile, un étudiant lambda.
Il utilise principalement internet pour ses loisirs, ses études, faire des recherches, aller sur les réseaux sociaux et pour se déplacer. Partons du principe qu’Emile ne comprend pas, pourquoi il doit accepter des “cookies” lorsqu’il se rend sur un site internet. Pour comprendre ce que sont ces fameux cookies et à quoi ils servent, Emile va devoir se renseigner sur comment fonctionne son moteur de recherche.
COMMENT LES ALGORITHMES DE RÉFÉRENCEMENT UTILISE NOS DONNÉES PERSONNELLES ?
On peut définir le référencement par l’utilisation de mots-clés, un usage pertinent de ceux-ci permet aux algorithmes de référencement de classer un site web, en fonction de son utilité et de sa permanence. Une bonne utilisation de mot-clé permettra à une page web d’être proposée suite à une recherche sur Google. L’algorithme de référencement est donc une suite d’opérations mathématiques réalisée par les moteurs de recherche pour obtenir un classement des différents sites web sur le critère de la pertinence.
Leur objectif est que vous tombiez directement et très facilement sur l’information que vous cherchiez. Pour cela, il reprend les mots clés de votre recherche et analyse le web pour trouver toute page reprenant les mêmes mots-clés dans le titre, l’article, ou encore l’adresse du site.
Lorsque l’on visite une page web, il devient de plus en plus fréquent qu’on nous propose d’accepter des « cookies » sous peine de se voir refuser l’accès au site. Le cookie est un fichier qui enregistre des informations liées à votre historique de navigation, cela permet ensuite au site en question de vous proposer du contenu ciblé en fonction de vos dernières recherches.
Grâce à un bon classement lié aux référencement et les cookies, les entreprises ont un moyen simple et efficace de toucher les consommateurs. En effet, grâce à de bons mots-clés, votre site est susceptible d’être parmi les premiers proposés à un utilisateur, et les cookies peuvent vous permettre ensuite d’être présent sur d’autres sites via la pub. Cela ne vous coûte pas plus cher, de plus, ce n’est pas une pub perdue sur internet qui ne trouve pas de cible, c’est une pub ciblée qui a de fortes probabilités de faire cliquer l’utilisateur.
L’EXEMPLE DE GOOGLE
Maintenant que Emile sait qu’est ce qu’un algorithme de référencement, il comprend mieux comment fonctionne son moteur de recherche préféré, Google. Le géant américain possède en effet en 2020, 65% des parts de marché dans ce domaine, il est donc plus que probable qu’Emile l’utilise au quotidien.
Pour ceux qui aimeraient en savoir un peu plus nous vous mettons un lien d’une vidéo récapitulative sur le fonctionnement de Google :
How Google Search Works (in 5 minutes) – YouTube
Mais Emile a envie d’en savoir plus et se pose les questions suivantes,
Après avoir utilisé mes données personnelles à des fins publicitaires, les conserve-t-il ?
Peut-il vendre mes données à n’importe quelle entreprise ?
Est-ce dangereux pour moi de laisser mon moteur de recherches détenir autant de mes informations personnelles ?
Pour répondre à la première question d’Emile, la réponse est oui. Comme la plupart des utilisateurs il possède un compte qui lui permet d’utiliser gmail, google doc, google drive et compagnie où il stocke ses documents ou encore photos de vacances. Lorsqu’il a créé son compte google, Emile a dû signer des conditions d’utilisations qui détaille l’ensemble des actions de l’entreprise vis-à-vis de ses données personnelles. Emile a bien signé ce document mais comme 66,7% des personnes interrogées cela l’inquiète beaucoup. Le conseil le plus évident qu’on pourrait lui donner serait de supprimer son compte google et utiliser un autre moteur de recherche.
Le seul problème c’est que Emile comme nous l’avons mentionné utilise quotidiennement Google et donc utilise par extension une grande majorité des plateformes de Google comme Youtube, Google Photos ou encore Google Docs. En effet, Google réponds à tous ses besoins sur internet comme le montre le graphique suivant :
En effet Google ne s’arrête pas seulement à notre historique de recherche pour établir votre profil publicitaire. Google s’est développé à tel point que vous pouvez littéralement organiser toute votre vie professionnelle comme personnelle grâce à ses plateformes (fonction calendrier qui retrace vos habitudes, google map qui retrace vos déplacements…). Il semble donc compliqué pour Emile de devoir tout supprimer quand Google lui permet d’organiser sa vie dans les moindres détails et sans efforts.
Donc oui Google garde nos informations car elles lui servent à faire fonctionner au mieux ses autres fonctions en les reliant. Par exemple, les publicités que verra Emile sur Youtube découlent de ses recherches sur Google. Cette interconnectivité des informations constitue un réel gain de temps pour Emile dans son utilisation des fonctionnalités Google et les rend d’autant plus indispensables pour lui car il a l’impression que Google sait réellement ce qu’il veut et peut lui fournir très rapidement.
Dans notre sondage nous avons observé que plus de 80% des personnes interrogées ont été dérangées par l’idée que leurs données personnelles soient utilisées à des fins commerciales, Emile en fait partie et se demande s’il existe des réglementations et comment peut-on faire pour réellement se protéger.
EN QUOI PEUVENT-ILS REPRÉSENTER UNE MENACE POUR LA PROTECTION DE NOS DONNÉES PERSONNELLES ?
ASPECT LEGAL
Les données de Emile sont-elles réellement protégées par la loi ?
En France le gouvernement protège les données personnelles depuis le 6 janvier 1978 avec la loi Informatique et Libertés. Cette loi réglemente pour la première fois le traitement des données personnelles des utilisateurs depuis la démocratisation de l’activité informatique.
De nos jours, avec l’explosion de l’informatique et d’internet cette loi a dû évoluer. Nous retrouvons aujourd’hui le Règlement général sur la protection des données appelé également le RGPD. Cette loi est entrée en vigueur dans l’Union Européenne le 24 mai 2016 et est applicable depuis le 25 mai 2018. Le but du RGPD est d’augmenter la protection des données à caractère personnel comme par exemple nom, prénom, adresse ou encore numéro d’identité. Le deuxième objectif de cette loi est d’accroître la responsabilité des acteurs qui utilisent les données personnelles des utilisateurs. En France, l’autorité responsable de la bonne application de cette loi est la Commission nationale de l’informatique et des libertés (CNIL).
Cette loi passe par de nombreux points clés comme par exemple la demande de consentement de l’utilisateur afin de récupérer ses données, la notification en cas de fuite données ou encore l’obligation des entreprises de réagir en cas de cyberattaque.
Les autorités européennes et françaises mettent donc de plus en plus de moyens en place afin de protéger les données des utilisateurs mais les utilisateurs doivent tout de même continuer à faire attention s’ils ne veulent pas que leurs informations personnelles soient traitées.
Lorsqu’une personne consent à ce qu’une entreprise traite ses données comme par exemple avec les cookies, la loi ne peut plus rien faire par la suite. L’utilisateur perd alors le contrôle sur ses informations personnelles et notamment sur l’utilisation de celles-ci. De plus aujourd’hui, ne pas consentir à l’utilisation de ses données personnelles est devenu de plus en plus difficile à cause de notre utilisation massive d’internet.
Les données personnelles d’Emile sont donc en partie protégées par la loi en Europe mais c’est à lui d’utiliser internet de façon à ce que celles-ci soient le moins exploitées possible.
ASPECT PSYCHOLOGIQUE/COMPORTEMENTAL
Les algorithmes de référencement sont un réel handicap pour la liberté d’expression. Peu importe ce que vous pouvez faire sur internet, ceux-ci choisiront à votre place ce que vous regarderez, achèterez ou encore vos amis. A titre d’exemple, les grandes plateformes comme Amazon, Netflix, Youtube et pleins d’autres encore vont proposer différents choix selon ce que vous avez pu regarder ou acheter auparavant. Le but est de capter votre attention sans relâche. Peu à peu vous devenez accro, limite fanatique. C’est sur ce point précis que les algorithmes pénètrent votre sphère privée en vous manœuvrant.
En plus de « manipuler » vos achats, les réseaux ont atteint un stade où ils sont dans la capacité de vous proposer des amis pouvant vous correspondre. C’est un algorithme qui premièrement récupère vos données puis, deuxièmement s’appuie sur une intelligence artificielle pour façonner ces fameux profils susceptibles de vous intéresser. Vos données peuvent être des publications aimées par vous ou votre entourage. Ainsi, vos propositions d’amis sont des calculs effectués par le réseau utilisé.
Un algorithme de référencement peut être utile et efficace s’il se focalise bien sur ce qui vous anime au quotidien. Ainsi vous disposerez du contenu qui vous correspond ainsi, vous entretiendrez une relation de confiance avec ces algorithmes. Cependant, quelques complications font surface lors de l’opération. On note effectivement de nombreux rassemblement de personnes ayant les mêmes goûts, opinions, ambition. Cela entretient et alimente donc les agitations qu’il peut déjà y avoir entre certains groupes opposés. On assiste à une division du peuple de grande ampleur.
Il n’est pas sans risque d’utiliser ces algorithmes. On retrouve parmi les nombreux problèmes causés celui de la fixation. La difficulté qui nous fait face est que plus on s’intéresse à un produit A, plus l’algorithme fera en sorte de vous en proposer. Tout au détriment du produit B qui se voit marginalisé, limite oublier. C’est pourquoi il est possible que vous n’ayez que des produits A de proposés. C’est également un phénomène qui peut expliquer le positionnement extrémiste de certaines personnes.
Finalement, les différents contenus proposés aux utilisateurs peuvent influencer leur manière d’être, leur état d’esprit. Internet et les algorithmes peuvent donc “contrôler” vos émotions. C’est un étude Américaine qui est à l’origine de cette découverte. Faites deux groupes et proposez deux contenus différents et vous obtiendrez des comportements différents.
Après avoir appris tout cela, Emile sait maintenant à quoi il fait face chaque jour lorsqu’il allume son téléphone ou son ordinateur. Maintenant pleinement conscient des dangers des plateformes qu’il utilise, libre à lui de continuer de les utiliser en adoptant un comportement plus prudent, il peut toujours faire le choix de se déconnecter totalement mais honnêtement cela n’est pas envisageable pour lui compte tenu de l’omniprésence d’internet dans sa vie quotidienne.
Comme 77,1% des personnes interrogées dans notre sondage, Emile avait au préalable mis en place des moyens de protéger ses données personnelles. Mais il sait maintenant qu’ils ne sont pas suffisants.
Les conseils que nous donnons à Emile aujourd’hui sont de varier régulièrement les moteurs de recherches qu’il utilise, essayer de stocker au minimum des documents personnels en ligne et se munir plutôt d’un disque dur. C’est aussi à lui de résonner son activité, s’il veut cacher des choses le bouton supprimer ne sera jamais son allié, en effet comme on le dit souvent : tout reste sur internet. Sur la plupart des sites il peut décider ou non d’accepter tous les cookies. Quand il s’inscrit sur un nouveau site, il peut utiliser différentes adresses mails et ne jamais enregistrer sa carte bancaire. Ces conseils lui sembleront basiques mais c’est un effort que peu de personne font. Pour le travail scolaire il pourra toujours se rendre à la bibliothèque. Tout dépendra de sa volonté à réellement protéger ses données.
Il devra aussi avoir un regard critique sur ce qu’il fait et ce qu’il voit sur Internet pour être pleinement conscient et maître de son image.
Même sans maîtriser la totalité du fonctionnement d’internet, il reste possible de protéger une partie de vos données personnelles, mais ce n’est certainement pas les plateformes qui vous aideront à le faire.
Ecrit par Tiphaine Lebreton, Jules Libessart, Pauline Pouilleux et Benoît Theoleyre
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iPhilo » Les esclaves psychiques d’internet ou la naissance de la «captologie»
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SOURCES PHOTOS
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